Le parcours d’une loi

Christine Le Nabour, députée d'Ille-et-Vilaine, vous explique le parcours d'une loi

Le parcours d’une loi

Le parcours d’une loi

Comprendre le parcours d'une loi en un coup d'oeil
Tout comprendre dans le détail :

(9 minutes de lecture)

 

Présentation :

Le parcours d'un texte de loi comprend 3 phases principales :

Cette procédure vaut pour les Projets de loi présentés par le Gouvernement, comme pour les Propositions de loi qui sont, elles, à l’initiative du Parlement.

 

Ces textes de loi comprennent toujours deux parties : l’Exposé des motifs et le Dispositif.

Le dépôt du texte :

Avant son examen par le Parlement, tout texte doit faire l’objet d’un dépôt sur le bureau de l'une des deux chambres. Pour les Projets de loi, ce dépôt est précédé de la consultation pour avis du Conseil d’État (en conseil du Gouvernement), suivie d’une délibération du Conseil des ministres. Au moment de son dépôt, le Projet de loi doit être accompagné d’une étude d’impact ; Les Propositions de loi peuvent elles, être déposées par un ou plusieurs parlementaire(s). Le Bureau de chaque chambre est chargé de vérifier la recevabilité financière des Propositions de loi (pas de diminution des ressources publiques ni de création ou aggravation d’une charge publique). Les Projets de loi de finances (PLF) et les Projets de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) doivent être déposés d’abord à l’Assemblée nationale ; à l’inverse, les lois ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumises en premier lieu au Sénat. En dehors de ces cas, l’examen d’une loi commence indifféremment devant l’une ou l’autre assemblée. À la suite de son dépôt annoncé officiellement, tout texte est renvoyé à l’examen d’une Commission (permanente ou spéciale le cas échéant).

Photos des salles de la Commission des affaires culturelles, de la Commission des lois, et de la Commission des affaires sociales à l'Assemblée nationale - Crédit photos : Assemblée nationale
L'examen en Commission :

Une fois déposé, tout texte est renvoyé à l’examen d’une des 8 commissions permanentes (sauf constitution d’une Commission spéciale). On parle de "Lecture". Le renvoi des textes de loi à l’une ou l’autre des Commissions est effectué par le Président de l’Assemblée nationale en fonction des compétences respectives de ces Commissions (on parle d’une "saisie au fond"). À noter qu’une ou plusieurs autres Commissions permanentes peuvent se saisir "pour avis", ou être saisie(s) par la Commission "saisie au fond" si une partie du texte relève de son domaine de compétence. La Commission "saisie au fond" désigne parmi ses membres un rapporteur chargé de présenter, au nom de celle-ci, un rapport qui sera mis à disposition. Il revient au rapporteur d’entendre les représentants des différentes organisations (syndicats, associations, expert...) concernées par le texte dont il a la charge, au moyen d’auditions notamment.  La Commission peut également procéder à des auditions avant d’engager l’examen d’un texte. À l’issue de ses travaux, la Commission "saisie au fond" adopte un rapport qui présente ses conclusions. Les éventuels avis rendus par les Commissions "saisies pour avis" sont annexés à ce rapport.

 

Depuis la révision constitutionnelle de 2008, la discussion en Séance publique dans l’hémicycle porte sur le texte adopté par la Commission "saisie au fond" et non sur le texte initialement déposé ou transmis (sauf pour les Projets de loi constitutionnelle, PLF et PLFSS). La Commission peut donc proposer un nouveau texte intégrant les amendements (des députés ou du Gouvernement) qu’elle a acceptés, adopter le texte dans sa version initiale, ou rejeter le texte. Dans ce dernier cas, la discussion en Séance publique portera sur le texte initialement déposé.

L’inscription à l’Ordre du jour :

Pour être discuté en séance publique, un Projet de loi ou une Proposition de loi doit être inscrit à l’Ordre du jour de l’Assemblée (délai minimal de 6 semaines entre le dépôt d’un texte et sa discussion en Séance publique, ou de 4 semaines pour un texte transmis par le Sénat – Sauf exceptions prévues). La Constitution institue depuis 2008 un partage de l’Ordre du jour, fixé par chaque assemblée.

  • 2 semaines sur 4 sont réservées par priorité à un Ordre du jour fixé par le Gouvernement
  • 1 semaine sur 4 est réservée par priorité au contrôle de l’action du Gouvernement et à l’évaluation des politiques publiques (semaine de contrôle)
  • 1 semaine sur 4 est réservée à un Ordre du jour législatif fixé par chaque assemblée
  • 1 journée par mois est consacrée à un Ordre du jour réservé aux initiatives des groupes d’opposition ou minoritaires (niche parlementaire).
L'examen en Séance publique :
Photos de l'hémicycle de l'Assemblée nationale, du banc des ministres, et du perchoir - Crédit photos : Assemblée nationale

L’examen en hémicycle est l’action la plus identifiée de l’Assemblée nationale par les Français. La discussion s’articule en deux phases :

La phase d’examen général est une phase de présentation. Le président de séance donne la parole au Gouvernement représenté par le ministre concerné par la discussion, puis au rapporteur de la Commission et, en cas de délégation d’articles, au rapporteur pour avis. Pour la discussion en 1ère lecture des Propositions de loi, la parole est d’abord donnée au rapporteur (10 minutes maximum à la tribune). Peut s’intercaler une motion de rejet préalable, dont l’adoption a pour effet d’entraîner le rejet du débat avant même que ne s’engage son examen détaillé (rarement adoptée).

 

La phase d’examen détaillé ouvre la discussion du texte, Article par Article. Les amendements peuvent être présentés par tous les participants au débat : Gouvernement, Commission saisie au fond et Députés à titre individuel. À l’exception des amendements du Gouvernement, les amendements doivent satisfaire (comme les Propositions de loi) à des conditions de recevabilité financière et relever du domaine de la loi. Tout amendement est recevable en 1ère lecture à condition de présenter un lien, même indirect, avec le texte examiné. La discussion porte sur chaque Article et sur tous les amendements qui s’y rapportent. Les députés peuvent tout d’abord s’inscrire, pour deux minutes dans la discussion d’un Article, dans la limite d’un orateur par groupe politique (et un non-inscrit). Après ces interventions, le président de séance appelle les amendements. La parole est donnée à l’auteur de l’amendement, puis au rapporteur de la Commission saisie au fond (ou au rapporteur pour avis lorsqu’il y a une délégation d’articles) et au ministre pour qu’ils donnent leur avis (favorable, défavorable ou sagesse). Enfin, la parole est donnée à deux orateurs, dont au moins un d’avis contraire. La durée de ces interventions autres que celle du Gouvernement ne peut excéder deux minutes.

 

Après l’examen du dernier amendement présenté sur un Article, l’Assemblée nationale vote sur cet Article, éventuellement modifié ; la discussion du texte se poursuivant dans les mêmes conditions, Article par Article, jusqu’au dernier. À l’issue de l’examen des Articles, il peut être procédé à une seconde délibération de tout ou partie du texte (à la demande du Gouvernement ou de la Commission). Le président de séance met ensuite aux voix l’ensemble du texte, éventuellement modifié par les amendements précédemment adoptés. Ce dernier vote peut être précédé d’explications de vote, qui sont accordées à un orateur par groupe (pour 5 minutes). Les votes ont lieu généralement à main levée. En cas de doute sur son résultat, le président de séance procède au vote "assis et levé". Dans ces deux cas, aucune précision sur le sens des votes des députés présents n’apparaît au compte rendu des débats, contrairement au Scrutin public ordinaire (qui peut être demandé par le Gouvernement, le président ou le rapporteur de la Commission, les présidents des groupes ou le président de séance). Pour certains textes importants, la Conférence des présidents décide elle-même le scrutin public, en fixant sa date à un moment favorisant la participation du maximum de députés (on parle alors de "vote solennel")

La transmission à l’autre chambre et la navette parlementaire :

Une fois adopté par la première assemblée saisie, le texte est transmis à l’autre assemblée qui l’examine à son tour. Si l’on part d’un exemple où l’Assemblée nationale aurait été saisie en premier, alors le texte est transmis au Sénat, et vice versa. On parle toujours de 1ère lecture, car elle est une 1ère lecture pour la 2ème assemblée. L’examen se déroule selon les mêmes modalités : examen par une Commission (permanente ou spéciale), puis inscription à l’Ordre du jour, et discussion en Séance publique.

Photos de l'extérieur du Sénat et de l'hémicycle du Sénat - Crédit photos : Sénat

Si la seconde assemblée adopte tous les articles du texte qui lui a été transmis sans modification, le texte est définitivement adopté. Dans le cas contraire, la "navette parlementaire" se poursuit entre les deux assemblées. À partir de la deuxième lecture, les articles précédemment votés en termes identiques par l’une et l’autre chambre ne sont pas remis en discussion (on parle d’Article "conforme"). Restent en discussion les Articles du texte pour lesquels les deux assemblées ne sont pas parvenues à l’adoption d’un texte identique.

 

Toutefois, la Constitution prévoit une procédure de conciliation via une "Commission Mixte Paritaire – CMP" composée de 7 députés et 7 sénateurs, chargés de s’entendre sur une rédaction commune du texte. Cette procédure permet au Gouvernement (ou aux Présidents des deux assemblées pour les Propositions de loi) d’accélérer le vote définitif d’un texte en interrompant le cours normal de la navette (dès la 1ère lecture si procédure accélérée pour un Projet de loi, à partir de la 2ème lecture en temps normal). En cas d’accord (on parle d’une "CMP Conclusive"), le texte est soumis au vote des deux assemblées. En cas de désaccord ("CMP non conclusive"), la navette parlementaire se poursuit. L’esprit qui prévaut est la recherche d’un consensus entre les deux assemblées, avec un dernier mot à l’Assemblée nationale du fait que les députés soient élus au suffrage universel direct. À noter que la Constitution offre des outils qui sont à la main du Gouvernement pour faire avancer l’adoption d’un texte (Engagement de la Responsabilité du Gouvernement [49.3], vote bloqué [44.3]…).

La promulgation de la loi :

L’adoption définitive d’un texte (par un vote, ou suite à l’engagement de la responsabilité du Gouvernement par le Premier ministre via le 49.3 sans adoption d’une motion de censure par la suite) clôt la phase parlementaire de la procédure législative. Vient ensuite la promulgation de la loi (sauf saisine du Conseil constitutionnel duquel il faut attendre l’avis le cas échéant, ou nouvelle délibération). Le texte définitif est transmis au secrétariat général du Gouvernement, qui est notamment chargé de présenter le texte à la signature du président de la République : lui seul à la compétence de promulgation. Le chef de l’État dispose d’un délai de 15 jours pour promulguer la loi, qui est ensuite publiée au Journal officiel de la République Française. Suivent la publication des décrets d’application rendant la loi effective dans les faits.


Source : assemblee-nationale.fr